Reporter de guerre

Publié le par Ellalie

    Aujourd'hui, je vous fais partager une rencontre très enrichissante : une rencontre avec un reporter de guerre qui a créé sa propre maison de production, vend ses reportages aux chaînes de télévision après avoir couvert des conflits pendant des années pour un groupe important.   
P. nous explique qu’en tant que reporter de guerre, il a la volonté de nous transmettre un message, de faire réagir l’opinion publique, et non de courir après le scoop. En effet, dans la réalité, les reporters des différents groupes ne sont pas concurrents : ils se retrouvent sur le terrain, et restent toujours ensemble. Un reporter a pour but de transmettre au téléspectateur l’émotion qu’il ressent sur le terrain. 
Il faut placer des journalistes de chaque côté pour couvrir un conflit en confrontant différents points de vue.

Voici un petit cours de grammaire … de l’image :

Chaque image et angle de vue est le fruit d’une réflexion préalable. En effet, on ne filme jamais de manière innocente. Avant même la réalisation d’un documentaire (52 à 90 min), une grande partie du tournage est pré-écrite : on décrit les personnes que l’on va rencontrer, la façon dont on va filmer, la façon dont va les habiller…

Si l’on habille le « témoin » avec des couleurs chaudes ou si on le cadre à gauche ou encore si le cadrage est serré, on souhaite que le téléspectateur éprouve de l’empathie pour cette personne.

Si l’on habille le « témoin » avec des couleurs froides, ou qu’on le cadre à droite ou encore si le cadrage est large, on souhaite que le téléspectateur garde de la distance par rapport au personnage.

Le cadrage serré suggère au téléspectateur : « écoute ce qu’il a à te dire, c’est intéressant ».

Un reporter qui filme un individu qui témoigne tout en faisant quelque chose (exemple d’un barman en train de préparer un café tout en témoignant), il souhaite dire aux téléspectateurs : « ne tenez pas trop compte de ce qu’il dit, ce n’est pas d’une grande importance ».

    Par ailleurs, la nationalité du journaliste influe sur sa manière de filmer. Par exemple, les reporters américains vont retracer toute l’histoire du conflit, du pays sur support d’images qui n’ont qu’une valeur illustrative (exemple d’une fusillade) alors que les reporters français vont raconter l’histoire de la fusillade. Les anglo-saxons suivent une autre logique, il sont dans une démarche beaucoup plus politique. Contrairement aux reporters français ou italiens, les anglo-saxons portent toujours un casque et un gilet pare-balle. Les reporters français préfèrent éviter ce port, car cela met de la distance entre eux et la population, qui se confie alors beaucoup moins facilement. Par conséquent, les reporters anglo-saxons sont obligés de porter ce gilet et ce casque car sinon les téléspectateurs ne vont pas comprendre qu’ils se trouvent dans un endroit dangereux.

Il est important que le documentaire permette une identification de la part du téléspectateur . Pour cela, il va utiliser des artifices : long passage sans commentaires, musique, entrecoupement de témoignages…).

Il faut prendre de la distance par rapport aux reportages d’Envoyé Spécial, Reportages ou Droit de savoir : ces reportages présentent des cas spécifiques, qui se rapprochent de la télé-réalité (on en parlera dans un prochain article), et la plupart du temps, ces reportages ne sont pas réalisés par des journalistes. Ils sont par ailleurs commandés par la chaîne, qui sait d’avance quelles images elle veut montrer du sujet choisi.

Publié dans Ell' & les médias

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E
exactement ! l'important, c'est d'en avoir conscience ...
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P
trés instructif .. meme si on s'en doute en ce concerne les emissions je me plaisais a croire que le documentaire ne cherchait pas a manipuler.<br /> Quoi qu'il en soit je ne sait pas si tu as vu le reportage sur la revolte qu'il y avait eu dans une prison en afghanistan mais comme tu le decris si bien, plusieur equipes de reporter de guerre etait present a ce moment precis.<br /> Arte nous a donc gratifié dela diffusion des dits reportages --> incroyable !!<br /> Les faits etaient les memes mais les montages/commentaire etaient diametralement opposés.<br /> En gros l'americain parlait des soldats des services secrets qui s'etaient fait lapider, le francais presentait l'experience sous l'angle "ma formidable aventure en afghanistan", et l'anglais (mon preferé je l'avoue) montrait les errements du QG americain et de leur frappes "chirurgicales" qui avait causé la mort de 20 soldats afghans alliés (et oui ils ont choisi de bombarder la prison pour "nettoyer" et "calmer" la mutinierie).<br /> ---> on nous montre et on nous fait croire ce que l'on veut
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